J’ai mal. Mon corps tremble. Ma tête veut exploser. Pourtant, je suis chez moi, à la maison. Je suis dans ma Zone de Sureté. Je ne devrais pas avoir mal, et pourtant... Je m’appelle Alyce Latangerine. Oui, comme une tangerine. C’est drôle. Je suis rousse. Une tangerine aux yeux bleus, LOL ! Bref, j’ai 20 ans. Je suis Québécoise, mais je ne suis pas comme les Autres. Quand je regarde leur monde, c’est comme si j’avais un morceau de verre brisé devant mes yeux. Tout est si étrange, si alien… Je suis souvent perdue. Mais cette histoire n’est pas celle de mes luttes pour « survivre » dans ce monde étrange qu’est la Réalité. Cette histoire n’est pas là pour parler de mon autisme, de mon horaire rigide ou de ma peau « qui brûle ». Non. Cette histoire est celle d’une aventure. Ma première et dernière.
Tout a commencé quand une lumière brillante m’a aveuglée. J’étais chez moi, j’avais mal… puis cette lumière (d’où venait-elle ?) est apparue. Lorsque je suis capable de voir à nouveau, je découvre que je ne suis plus chez moi. Je suis dans une chambre aux murs orange. Si j’avais été plus jeune, la panique aurait rempli mes pensées, mais j’ai appris depuis longtemps à me contrôler. À lutter en silence contre le grand et puissant Inconnu. Il adore me tourmenter.
Soudain, j’entends une voix féminine.
« Il y a quelqu’un ? »
« Oui. » Répondis-je. « Où suis-je ? »
La porte de la chambre s’ouvre et je vois une femme blonde. Ses cheveux sont attachés en deux couettes. Elle a de tout petits yeux verts et je pense qu’elle vient de la Russie.
« T’es… dans une maison. » Dis la femme.
« Ça ne répond pas à ma question ! » M’exclamé-je.
« T’as raison. Tu es… dans une maison hantée. »
« Une maison hantée ? »
« Ouais. Il est impossible de sortir d’ici. Kuramiyo a tout essayé puis il y a… ces créatures sans genre défini… »
Tout à coup, un long gémissement se fait entendre.
« C’est… C’était quoi ça ? » Demandé-je à la femme blonde.
« Pas encore ! »
La femme blonde se met à courir et je la suis. Elle ouvre une porte en lui donnant un coup de pied et je tombe sur une scène… cocasse.
Une femme japonaise est plaquée sur le plancher par une créature mauve. Un gros tas de gelée. La dame pousse un orgasme alors que la chose pénètre son orifice vaginal… son trou avec son pénis. Est-ce vraiment un pénis ? Je n’ai pas eu le temps de bien le voir.
« Kuramiyo !!! » S’exclame la femme russe.
« Ohhhhhhhh… bonjour à vous, M. »
M ? Drôle de nom.
« LAISSE-LA TRAN-- ! » Commence à hurler M avant de se faire interrompre.
« Non, non… Ça va. » Dis Kuramiyo. « Laisse-lae faire. J’aime ça. »
Elle pousse un autre cri de plaisir.
« Mais… »
La créature retire son pénis. Oui, c’est bel et bien un pénis, fait à partir d’un liquide gluant. Sans plus attendre, iel le ramène dans son trou. Encore et encore et…
« Ah… ah… ahhh… » Gémit la femme japonaise. « Plus vite, plus viiiiiiiiiiite ! »
« Kuramiyo… sait-tu qu’iel va tenter de te tuer après qu’iel ait fini ? » Demande M.
« Je saaaaaais… mais je peux m’en… occuper. »
Elle pousse un long orgasme, puis elle nous demande de les laisser seul(e)s. M me fait signe de la suivre et elle m’amène dans un petit salon.
« Bon, tu veux sans doute des explications ? » Me demande-t-elle.
« Oui. »
« Alors, je m’appelle Alyce M. Comme Kuramiyo s’appelle aussi Alyce, nous utilisons nos noms de famille pour communiquer. Nous nous sommes tous deux retrouvés dans cette maison après avoir été aveuglés par une lumière étrange. Hazel, une autre Alyce, nous a rejointes rapidement. Nous avons tenté de partir, mais il est impossible de quitter la maison. En plus, elle est habitée par ces choses. En lisant des notes écrites laissées par d’anciennes prisonnières, nous avons appris qu’iels se nourrissent des âmes de leurs victimes après avoir satisfait leur grande libido. »
« Alors, ils… elles… euh… »
Je ne sais pas quel pronom utiliser.
« Iels… nous utilisons ‘iels’ pour parler de ces créatures. » Explique M. « Oui, iels m’ont enculée aussi. Cela devrait me dégoûter et pourtant… »
« Vous dégoûter ? »
« Ouais, parce que j’ai déjà été victime d’un viol, alors le sexe, je m’étais dit ‘plus jamais ! c’est dégoûtant et douloureux !’, mais ces choses… iels me donnent tellement de plaisir… C’est fou, mais j’en demanderais encore. »
« Mais… iels tuent après le sexe, non ? » Demandé-je a M.
« Normalement, oui, mais on peut les repousser par la suite. Hazel a découvert une incantation qui peut les chasser… pour un temps. C’est vrai. Je ne t’ai pas demandé ton nom. C’est quoi ? »
Je lui dis que c’est Alyce.
« WOW ! Quatre Alyce. C’est flippant ! » Dit M. « Et ton nom de famille ? »
« Latangerine. »
« Re-wow ! Une tangerine. C’est marrant. Je vais t’appeler Latangerine à partir de maintenant. Ça te va ? »
« Ça me va. »
« Je me demande ce que fabrique Hazel-- » Commence à dire M.
Soudain, l’écho d’une voix se fait entendre. Une voix jeune et puissante.
« ♪ I am the flesh of your blood. ♪ »
On entend un hurlement inhumain puis tout devient silencieux.
« C’était quoi ça ? » Demandé-je a M.
« Hazel vient de chasser l’une des créatures. »
Cette voix appartenait à Hazel, mais ai-je bel et bien entendu de l’anglais ?
« Elle est américaine, » explique M « mais cela n’explique pas pourquoi l’incantation est en anglais, ni pourquoi il faut la chanter pour qu’elle fonctionne mais elle fonctionne. C’est tout ce qui compte. Cependant, Hazel nous a prévenus de ne jamais l’utiliser jusqu’au bout. »
« Pourquoi ? » M’interrogé-je.
« J’en sais rien. Elle ne veut pas m’en dire plus. »
« Cette incantation… où l’a-t-elle trouvé ? »
« Dans un livre, mais elle l’a brûlé. Je l’ai assez grondée à ce sujet. »
Tout à coup, deux créatures traversent un mur et arrivent devant nous. M me demande si je suis toujours vierge. Je lui dis oui.
« Alors file ! » Me dit-elle. « Je peux très bien ‘danser’ pour deux. »
Je ne comprends pas de quoi elle parle.
« SAUVE-TOI ! » Hurle M. « ALLEZ !!! »
Je ne sais pas comment j’ai fait, mais je parviens à fuir. J’entends M pousser un orgasme au loin. Je compte m’enfermer dans une salle de bain quand je vois une jeune femme à la peau brune et aux cheveux noirs assise sur la toilette. Elle doit avoir 19 ans, pas plus. Je demande à la jeune femme si elle est Hazel.
« Oui. Une seconde… »
J’entends un « plouf ! » dans la toilette. Hazel venait de faire caca.
« Alors, es-tu une nouvelle arrivante ? » Me demande Hazel.
« Oui. Alyce Latangerine. M… elle est… »
La voix de M se fait entendre à nouveau. Elle semble en pleine extase.
« En train de ‘danser’. Sacrée M ! Même après son agression, elle est capable de tenir tête à ces Trackiyo. »
Je demande à Hazel ce qu’est um Trackiyo.
« Le nom de ces créatures. »
Sans se gêner, elle s’essuie et remonte son pantalon.
« Allons continuer notre conversation ailleurs. »
Nous retournons dans la chambre aux murs orange. En chemin, j’entends Kuramiyo chanter une autre partie de l’incantation. On entend un autre hurlement inhumain puis plus rien. Hazel me dit que M et Kuramiyo se sont habitués à l’incantation, mais cela ne va pas les aider à se libérer de cet endroit.
« Pourquoi ? » Lui demandé-je. « Je ne comprends pas… »
« Parce que… Ok. Accroche-toi, c’est une longue histoire. »
Dans un monde différent du nôtre, Adonan Amaury, un sorcier ainsi qu’un gros pervers, est tombé amoureux d’Alia Rouviot, une guérisseuse. Elle ne voulait pas de lui, alors il lui a jeté un sort pour qu’elle devienne son esclave sexuelle.
Hazel ne connaît pas tous les détails, mais, quand Alia est tombée enceinte d’Amaury, son sort s’est affaibli. Alia, pour se libérer de son maître, s’est vengée en utilisant sa propre magie contre lui.
Elle l’a enfermé dans sa propre maison, dans une autre dimension, là où vivent les Trackiyo, ces créatures sans genre défini. Iels l’ont tué assez rapidement, après l’avoir enculé à maintes reprises, mais Amaury n’avait pas dit son dernier mot. Pour se venger à son tour, il a utilisé le reste de ses forces pour jeter un dernier sort.
« Ce sortilège prend des femmes au hasard, souvent de différents mondes, puis les amène ici. » Continue de raconter Hazel. « Tu sais ce qui leur arrivent. Seulement voilà, l’une de ces femmes, une certaine Arc… Arc…lita ? Non. Arcélia. Elle avait des pouvoirs magiques. En se sacrifiant, elle a créé une incantation qui peut détruire les Trackiyo, la maison et cette dimension, sauvant ainsi de futures victimes. Seulement, l’utilisation de l’incantation requiert le sacrifice de son utilisatrice. »
« Un sacrifice… » Dis-je en réfléchissant.
« Et celle-ci ne fonctionne que si la « chanteuse » est vierge, comme Arcélia. Kuramiyo, M et moi… nous ne sommes plus vierges. Je leur ai dit de ne pas utiliser l’incantation au complet pour cette même raison. À quoi bon mourir si-- ? »
Je sens que ma tête va exploser. Je suis vierge. Je sais. Cela semble impossible, mais… Je ne connais même pas ma sexualité. Avec ma peau « qui brûle », dû à sa sensibilité, l’idée d’avoir des contacts sexuels me rebute.
D’ailleurs, je n’ai jamais eu d’attraction pour les hommes ni les femmes. Mais, bordel, je suis une vierge ! Je peux alors détruire les Trackiyo. Je peux sauver d’autres femmes, mais pour cela, je dois… Je dis à Hazel que je suis vierge.
« Merde ! Tu ne blagues pas ? »
« Non. M a vraiment insisté pour que je m’enfuie face aux deux Trackiyo, tout à l’heure. Elle savait, pour l’incantation et la virginité ? »
« Non ! J’étais la seule au courant. Latangerine. Tu peux tout faire cesser. »
« Je sais, mais-- »
« Nous sommes condamnées, de toute façon. Il est impossible de quitter cette dimension. »
Tout à coup, la voix de Kuramiyo crie que des créatures se dirigent vers nous. Hazel dit un juron. La voix de Kuramiyo nous dit ensuite qu’elle peut les chasser avec M. Hazel lui hurle de le faire. Malgré les efforts combinés de M et de Kuramiyo, trois Trackiyo entrent dans la chambre.
« Ok, écoute-moi bien. » Dis Hazel. « Je ne pourrais pas la refaire ! »
« Mais je-- ! »
« ♪ I am the flesh of your blood. ♪ »
Les Trackiyo crient, comme si des lames invisibles s’étaient plantées dans leurs corps gélatineux, mais iels ne disparaissent pas.
« Ah… vous êtes des durs à cuire. Ça me plait ! ♪ Your lust still flows through me. ♪ »
Les Trackiyo poussent un autre cri et iels se volatilisent.
« Déjà ? » Dis Hazel. « Pathétique. »
M et Kuramiyo entrent dans la chambre.
« On les a eus ! » Dis M.
« Non, ce n’est pas fini. » Dis Kuramiyo.
D’autres Trackiyo apparaissent.
« AH-HA ! ♪ I have shred over a thousand tears. ♪ »
Iels se font massacrer par Hazel, mais d’autres prennent rapidement leur place.
« ♪ I do not fear death, but life is fading away. ♪ »
Kuramiyo tente de parler à Hazel, mais elle continue de chanter.
« ♪ I had endured pain to survive to you. Yet, in the end, my being is nothingness. ♪ »
M crie à la jeune femme d’arrêter.
« ♪ So, I beg you… ♪ »
Les Trackiyo continuent de disparaître, d’autres continuent de venir, et Hazel ne compte pas arrêter.
« ♪ Vanish! ♪ UNLIMITED DIMENSION BREAKER! »
Il y eut une forte lumière. Les Trackiyo disparaissent en hurlant et le corps inanimé de Hazel tombe au sol. M crie sa détresse, Kuramiyo pleure de douleur et de rage. Malgré ma peine, je leur explique ce que m’a dit Hazel.
« Je n’ai pas envie de mourir. Vraiment pas ! » M’exclamé-je. « Mais je peux détruire les Trackiyo… je peux venger Hazel, Arcélia, et les autres femmes qui étaient prisonnières… »
« Alors je sais quoi faire. » Dis Kuramiyo. « Nous devons les distraire pendant que vous chantez l’incantation. »
« Comment comptes-tu faire ça ? » Demande M.
« Hazel… Saviez-vous qu’elle était lesbienne ? »
« Ouais. » Dis M à Kuramiyo. « Elle m’avait déjà demandé si j’aimais les filles… pourquoi, t’es lesbienne, toi aussi ? »
« Je suis pansexuelle. »
Kuramiyo dit ensuite que, si M et elle a une relation sexuelle, elles vont attirer les Trackiyo. L’idée insulte M car elle est hétéro, mais Kuramiyo lui dit qu’elle doit m’aider.
« Et nous allons mourir bientôt, alors j’aimerais bien avoir du vrai plaisir avant la fin ! » S’exclame la femme japonaise.
« Parce que t’avais pas de plaisir quand les Trackiyo t’enculaient ? » Demande la femme russe.
« Ce n’est pas la même chose ! Allons, M. »
« Non ! »
« Je vous en prie. »
« J’ai dit NON ! »
« Euh… » Dis-je pour qu’elles cessent de se chicaner. « D’autres Trackiyo arrivent. »
Je les vois passer au travers du mur.
« Et pis merde ! » Dit M. « Allons-y ! »
Elle se déshabille en hâte. Kuramiyo fait de même. Elles se couchent sur le plancher, l’une contre l’autre. Je ne peux m’empêcher de rougir.
« Chante, Latangerine ! » M’ordonne M.
Tout en hésitant, M va mettre ses doigts dans le trou d’amour de Kuramiyo. Kuramiyo gémit doucement, puis elle embrasse M passionnément. Je vois le visage de M devenir rouge. C’est étrange. Elle semble aimer ça.
« OK C’EST PARTI ! » Crié-je avant de chanter.
♪ I am the flesh of your blood. ♪
♪ Your lust still flows through me. ♪
♪ I have shred over a thousand tears. ♪
♪ I do not fear death, but life is fading away. ♪
♪ I had endured pain to survive to you ♪
♪ Yet, in the end, my being is nothingness. ♪
♪ So, I beg you… ♪
♪ Vanish! ♪ UNLIMITED DIMENSION BREAKER!
Tout devient blanc autour de moi. Ma vie s’envole. Mais je sais que j’ai réussi. Les Trackiyo sont détruits. Arcélia et Alyce Hazel sont vengées. Alyce M et Alyce Kuramiyo… je ne vais jamais les oublier. Je suis morte en héroïne.
Dommage que personne ne va le savoir. Sauf vous. Merci à vous. En passant, ne trouviez-vous pas l’incantation étrange ? Arcélia est morte étant vierge et, pourtant, les paroles semblent parler d’une personne ayant perdu sa virginité face aux Trackiyo. Hum.